Comment j’ai commencé à apprendre le Français ?
S’il ne veut pas risquer d’être fou, l’être humain peut s’adapter aux exigences et contraintes de son environnement pour vivre en s’adaptant aux contextes qu’il rencontre.
« La torture a pris fin et vous serez amené à un grand dortoir, vous êtes des opposants politiques pas des terroristes, et mon colonel le directeur le sait bien, soit vous obéissez soit vous aurez plus droit à plus de privilèges », nous dit le sergent en faisant signe au soldat de fermer la porte.
C’était un jour de juin 1982, il faisait très chaud, même si la prison se trouve en plein désert dans un oasis qui s’appelle Palmyre. Nous ne savions pas combien de temps nous resterions dans cet endroit, mais en tout cas nous devions nous adapter à notre situation, et peut-être il était préférable que nous bavardions, riions, bien sûr, d’une voix basse, mais aussi on devait penser à faire des choses utiles.
Mon camarade Ali, qui n’avait pas encore fini ses études de médecine, a suggéré d’enseigner le français à qui le voulait. Moi, j’ai bien aimé l’idée et j’ai été ému parce-que ça aurait fait plaisir à mon père qui parlait français, tandis que la deuxième langue de tout ses enfants était l’anglais.
On a commencé oralement à conjuguer les verbes : avoir, être, aller, mais la prononciation du français n’était pas facile et nous nous moquions l’un de l’autre en prononçant les syllabes et les sons français : ou, eu, u , eau, ui, oi…etc. Nous avions besoin d’écrire mais comment ?
La Papeterie
Fumer, ce n’était pas interdit, et le paquet vide du tabac nous à servi de page blanche prête à utiliser directement. Mais il fallait décoller la couche mince d’aluminium à l’eau pour séparer et obtenir une autre page. Et les crayons ? Par hasard on trouvait des morceaux métalliques qui laissaient des traces sur le papier.
Alors on a fabriqué des cahiers… nous étions cinq et le cours avançait avec beaucoup de joie notamment avec des vers de La fontaine (le loup et le renard). Deux années ont passé et on a recommencé de nouveau après la réception des méthodes de français « le Mauger bleu (G. Mauger, Cours de langue et de civilisation françaises). Six ans plus tard nous étions transférés à une autre prison près de Damas s’appelle Sednaya, au nom d’un village historique de l’époque assyrienne. Les autorités ont permis l’arrivée de la presse étrangère c’est alors que j’ai commencé à traduire des articles du Monde Diplomatique pour mes camarades. Aussi nous avons lu des romans ou des nouvelles en français comme L’étranger d’Albert Camus et beaucoup d’autres livres pédagogiques.
Je ne pourrais pas dire que j’avais atteint un bon niveau de la langue française, mais elle ne m’était pas étrangère non plus, et je pourrais développer mon niveau quand je veux.
J’ai passé dix-huit ans en prison et quand je suis sorti, mon père était décédé et, jamais je ne pensais que je résiderais en France fuyant la peur de l’arrestation et la guerre, essayant de mieux connaître la langue et la civilisation française.
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